Rétrospective L’OEIL LIMOSIN en 3 films !
Rétrospective L'OEIL LIMOSIN en 3 films du 13 au 17 avril !
MAIS QUI EST JEAN-PIERRE LIMOSIN ?
Est-ce le cinéaste virtuose et bouleversant de longs métrages de fiction consacrés aux tremblements amoureux et érotiques de la jeunesse ? Ou le cinéaste fin portraitiste qui a signé quelques-uns des plus beaux épisodes de la mythique collection «Cinéastes, de notre temps » (et pas des moindres: Abbas Kiarostami, Takeshi Kitano, les frères Dardenne, Alain Cavalier, entre autres…)? Est-il le cinéaste d’une géographie française trop peu visitée (la banlieue, la province) ou un cinéaste japonais (avec des incursions en Iran)?
En 1983, son premier film, Faux-fuyants, co-réalisé avec Alain Bergala, est 7e du fameux top 10 des Cahiers du cinéma (ex æquo avec les magnifiques Trois couronnes du matelot de Raoul Ruiz). Depuis, il est invisible. En 1986, son second film, Gardien de la nuit, est 9e du même classement (cette fois ex æquo avec les indispensables After Hours de Martin Scorsese et L’Âme sœur de Fredi Murer). Depuis? Invisible. En 1998, Frédéric Bonnaud écrit ceci dans Les Inrockuptibles à l’occasion de la sortie de Tokyo Eyes: « Jean-Pierre Limosin est un cinéaste qui revient de loin. À la fois du Japon et de dix ans de silence en tant qu’auteur de fictions. Chroniqueur photo des Cahiers du cinéma à l’orée des années 1980, auteur estimé de Faux-fuyants (coréalisé avec Alain Bergala) et de Gardien de la nuit, il connaît un échec public avec L’Autre nuit […]. Pendant ces dix ans, Limosin s’est remis de ses émotions en se couchant de bonne heure, a réalisé des documentaires […] et créé une petite société de production. Libéré de toute pression malsaine tout en ayant structuré sa fragilité, rendu au statut de nom autrefois prometteur (pour quelques-uns) ou d’illustre inconnu (pour la plupart), Limosin était prêt à effectuer ce come-back triomphal. Mais ce lent retour devait comprendre un long détour. Initié par un producteur japonais pour devenir un film français, Tokyo Eyes est devenu le premier film japonais réalisé par un Français, en japonais, avec des acteurs locaux dont l’immense Takeshi Kitano comme parrain bienveillant. En plus d’être une des plus belles réussites de l’année, Tokyo Eyes a donc le charme de l’anomalie. Ce qui ne signifie pas que Limosin a succombé à la tentation de la “japoniaiserie” mais que, au contraire, il a parfaitement réussi sa greffe, jusqu’à la faire oublier. Tokyo Eyes n’est pas un “voyage en Orient” de plus, mais un approfondissement et un décalage des thèmes de son Gardien de la nuit, confrontés à une langue et à des corps étrangers. Si on y retrouve le même désir de légèreté et la même révolte face à une réalité trop insupportable, ces éléments ne sont nullement plaqués. Ils semblent émaner des déambulations amoureuses des deux héros, Shinji et Hinano, dans les rues de Tokyo. Tokyo Eyes tient donc les promesses de son titre et se présente comme le film d’un auteur qui a su se déplacer et aiguiser son regard. Comme Faux-fuyants et Gardien de la nuit parvenaient à capter l’atmosphère frivole et inquiète des années 1980, Limosin saisit un peu de “l’air du temps”, mais pour se situer résolument au présent de l’indicatif, pour inventer un cinéma de l’incident volatil plutôt que de l’événement lourd. Comme ses personnages, Limosin tend à introduire toujours plus de désordre dans le but d’en extraire un peu de vérité. […] Cinéaste épris de perturbation, il a su se souvenir de la règle que lui confiait Alain Cavalier: “Dans un film, tout devrait être du désir” ». Et depuis sa sortie il y a près d’un quart de siècle, le magnifique Tokyo Eyes est… pratiquement invisible.
ALORS, QUI EST JEAN-PIERRE LIMOSIN ? L’auteur plus que prometteur de fictions formidables et passionnantes et de documentaires passionnants et formidables. C’est bien le même remarquable cinéaste qui se cache derrière ces films, et L’ŒIL LIMOSIN – trois films dont les restaurations ont été réalisées sous son bienveillant contrôle –est l’occasion de le (re)découvrir– et de s’émerveiller de son sens du jeu, du détour, de sa malice et de l’ampleur de sa mise en scène. Enfin, ces trois OVNI sont à nouveau visibles.
Faux-Fuyants
avec Rachel Rachel, Serge de Closets et Olivier Perrier
France - 1983 - 1H30
À la sortie d’un cinéma parisien, Serge écrase accidentellement un inconnu. Paniqué, il s’enfuit. Rongé par le remords, il se rapproche de la famille de la victime et découvre sa fille, Rachel. Il va tenter d’intervenir clandestinement dans la vie de la jeune fille. Est-ce parce qu’il cherche à réparer sa faute que Serge s’immisce dans la vie de Rachel ? Se liant dans le même temps avec Simon, le fils de sa logeuse, le voilà qui va influencer le destin des deux adolescents. Manipulés – avec une curieuse bienveillance –, la baby doll (du groupe de rock Tokow Boys, future moitié de Luna Parker) et le jeune écrivain boutonneux se retrouvent au cœur d’une intrigue acidulée, prenant des couleurs au fil des saisons. Une évolution dans le temps, due au tournage, étalé de mars à décembre 1982 à raison d’une semaine par mois. Expérience qui participe à la grande originalité du film, tout comme les décors au réalisme insolite de la banlieue parisienne. C’est une belle échappée, loin de l’ordinaire et des conventions, que ces Faux-fuyants . Une première oeuvre imprévisible, inclassable, légère et feutrée.
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Gardien de la Nuit
avec Jean-Philippe Écoffey, Aurelle Doazan et Vincent Perez
France - 1986 - 1H46
Yves regagne Montluçon en train, zieute une fille à côté de lui, en reluque une autre dans la rue, à peine arrivé, pour, finalement, piquer la voiture de cette dernière et aller retrouver sa petite amie Aurore, infirmière à l’hôpital local. Yves mène une double, une triple vie. Le jour, tantôt il rejoint Aurore et son clan de riches admirateurs à la piscine, frôle le grand monde ; tantôt il n’est qu’un simple voyou, jouant à défier la société et à se défier lui-même. La nuit, il écume les rues de la petite ville dans la voiture de la police municipale, défenseur de l’ordre et des bonnes moeurs, avec une nuance qui a son prix : cette police est parallèle. Mais ses flics ont toute l’apparence des vrais.
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Tokyo Eyes
avec Shinji Takeda, Hinano Yoshikawa et Kaori Mizushima
France - 1998 - 1H39 - VOSTF
Un fait divers perturbe Tokyo : un jeune homme, surnommé « le bigleux » en raison de ses épaisses lunettes, défraie la chronique en tirant sur des gens à bout portant, sans raison apparente. La jeune Hinano, dont le frère est policier, a entraperçu le portrait-robot de l’intéressé, et acquiert bientôt la certitude d’avoir déjà vu ce « bigleux » sur la ligne de métro qu’elle emprunte chaque matin. Elle se met en tête de retrouver toute seule l’énigmatique personnage…
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