Averroès et Rosa Parks
France - 2024 - 2H24 - VF
Averroès et Rosa Parks : deux unités de l’hôpital Esquirol, qui relèvent - comme l’Adamant - du Pôle psychiatrique Paris-Centre. Des entretiens individuels aux réunions « soignants-soignés », le cinéaste s’attache à montrer une certaine psychiatrie, qui s’efforce encore d’accueillir et de réhabiliter la parole des patients. Peu à peu, chacun d’eux entrouvre la porte de son univers. Dans un système de santé de plus en plus exsangue, comment réinscrire des êtres esseulés dans un monde partagé ?
« Avec « Averroès et Rosa Parks » Nicolas Philibert poursuit l’exploration d’un sujet qu’il a déjà commencé à creuser dans le film « Sur l’Adamant » qui avait remporté l’Ours d’Or lors de la Berlinale 2023. Le film commence par des rendez-vous filmés entre des patients et des médecins. Il y a des patients avec de forts troubles psychiatriques, qui ont besoin de rester dans cette unité, mais aussi d’autres qui sont sur le chemin du retour vers leur autonomie. Les médecins sont à l’écoute des patients, et dès le début le sujet du manque de temps du personnel soignant est évoqué.
C’est après plusieurs de ces rendez-vous filmés que le documentaire laisse place aux réunions de groupe entre les patients et l’équipe soignante. Et c’est à partir de ce moment-là que le vrai sujet du film se dévoile : le manque d’humanité, dû au manque de temps du personnel soignant. En effet, les patients se plaignent unanimement du manque de relation sociale, de discussions, de temps plus calme, hors des soins, qu’ils aimeraient partager avec l’équipe de l’hôpital. Cependant, lors des rendez-vous entre les patients et les médecins, il n’est pas question de traitement médicamenteux, mais bien de réelles discussions profondes ou plus superficielles avec les patients, afin de les accompagner sur le chemin de l’autonomie.
En ce sens, le documentaire montre bien les failles du système de santé psychiatrique en France. Même si lors des rendez-vous prévus avec les patients, il y a des discussions, selon eux, ce n’est pas suffisant. Ils aimeraient partager une discussion plus informelle lorsque l’infirmière passe dans leurs chambres, par exemple. Outre ce sujet qui est parfaitement bien traité, les prises de paroles des patients s’avèrent à la fois poignantes et touchantes, les personnes étant filmées avec des plans rapprochés ou des gros plans lors des rendez-vous, ce qui permet de placer le spectateur au plus proche des patients et de leurs récits. Il est alors impossible pour le spectateur de se sentir distant face à ces sujets, merveilleusement bien traités et dont la parole ainsi que leurs demandes, sont mises en valeur.
Enfin, il y a une chose à laquelle on peut ne pas s’attendre lorsqu’on regarde un documentaire sur les unités psychiatriques : rire. En effet, l’humour a une place très importante dans le film : les patients font beaucoup de blagues et lors des séances de groupe, les discordes entre les patients créent des situations qui font rire l’équipe médicale, avec bienveillance bien sûr. Le film ne se moque en aucun cas des patients, ce sont eux qui ont finalement un certain recul et une capacité à plaisanter, créant ainsi ce climat détendu qui leur permet de passer de bons moments. » Abus de ciné